Soyons reconnaissants envers nos prédécesseurs, qui ont été les artisans de la création des Ateliers-Ecoles.
Le 28 février 1931, M. Gornet, directeur des « Ateliers-Ecoles de la Ville de Troyes » présente son 1er rapport de leur fonctionnement depuis leur fondation le 1er octobre 1929.
L’initiative hardie prise par la Chambre d’Apprentissage dans cette création, et la rapidité avec laquelle son Président M. Pargeas a procédé à l’organisation ont eu pour résultat de doter la Ville de Troyes et le Département de l’Aube d’un organisme d’Orientation professionnelle expérimentale et de Préapprentissage capable de rendre les plus grands services. Les résultats tangibles obtenus dès leur 1ère année de fonctionnement, l’augmentation des effectifs constatée à la rentrée d’octobre 1930, passant de 30 à 50 élèves permettent d’affirmer que les Ateliers-Ecoles de la Ville de Troyes sont appelés à prendre plus d’extension. Rapidement leur sont venus les encouragements et les marques d’intérêt que leur ont témoigné, sous forme de subventions, la Chambre de Commerce de Troyes, la Chambre Syndicale de la Métallurgie, la Chambre Syndicale du Bâtiment et même quelques individualités. Le Conseil Général de l’Aube fut le premier à voter un crédit de 5.000 frs. Ont suivi le Sous Secrétariat de l’Enseignement Technique et la Municipalité Troyenne qui a concédé les locaux nécessaires, en assurant leur chauffage et l’éclairage et en votant 10.000 frs de crédits.
Originalité des Ateliers-Ecoles : prendre l’enfant à sa sortie de l’école primaire et l’orienter vers le métier pour lequel il a le plus d’aptitudes, parfaire sa culture générale, amorcer l’apprentissage par des méthodes rationnelles. Le choix du métier dépend bien souvent du hasard ou de la mode, quelquefois aussi du goût de l’enfant, mais le goût et les aptitudes ne correspondent pas toujours. Les Ateliers-Ecoles se proposent de substituer au choix empirique de sa profession par l’individu, un choix plus systématique, plus éclairé, plus rationnel. L’important est de mettre chacun à sa place en tenant compte des aptitudes de l’enfant, de son goût, de sa culture, de son état physique, du désir des familles, de la situation du marché du travail, des besoins en main-d’œuvre, des salaires pratiqués dans chaque branche de l’activité nationale.
La fiche d’orientation professionnelle mentionne le métier conseillé par l’orienteur, celui qui répond le mieux aux aptitudes et aux goûts de l’enfant. Sur 30 familles consultées, 28 se sont prononcées en faveur du métier conseillé. Au moment de l’inscription des élèves, les professions désirées par les familles et leurs enfants se répartissaient ainsi : Mécanique-Ajustage : 20, Electricité : 1, Menuiserie-Ebénisterie : 7, Métaux en feuilles : néant, sans indication de profession : 2. A la fin de la période d’orientation professionnelle expérimentale, la répartition des professions choisies se modifiait ainsi : Mécanique-Ajustage : 14, Menuiserie-Ebénisterie : 9, Métaux en feuilles : 7. 20 élèves ont été orientés vers la profession qu’ils avaient eux-mêmes choisie, 8 autres, après la période de stage expérimentale, ont dû renoncer à leur premier désir et choisir un métier plus conforme à leurs aptitudes. 7 élèves se sont révélés aptes au métier de ferblantier, tôlier, zingueur, plombier, alors qu’aucun d’entre eux n’avait songé au travail des Métaux en feuilles.
Une autre originalité des méthodes employées aux Ateliers-Ecoles consiste à parfaire la culture générale des jeunes apprentis : 50% d’enseignement général, 50 % de travail manuel : « La machine ne demande pas seulement un conducteur, elle demande aussi des soins, de l’entretien et un outillage qui ne peut être confié qu’à des mains expertes. La machine produira d’autant mieux que vous la donnerez à un observateur intelligent, qui assimilera son mécanisme, qui pourra, par suite, la tenir en bon état de marche sans consulter le contre maître ou le patron. Etendre le domaine intellectuel de l’apprenti, c’est encore travailler à la formation et au développement de son esprit critique, c’est l’amener, lorsqu’il sera devenu homme, à juger plus sainement les faits et à tracer lui-même sa voie, c’est développer sa conscience professionnelle et lui faire aimer le travail, c’est le mettre à même d’utiliser plus noblement ses loisirs. L’effort de notre enseignement tend également vers un but éducatif, celui qui consiste à donner la santé morale à nos jeunes gens. De bons conseils et d’utiles directions tendent à faire naître en eux et à développer les qualités d’ordre et d’économie, l’amour du travail et la conscience professionnelle, les sentiments de camaraderie durables et aussi de solidarité qui unissent tous les éléments du travail moderne et élèvent l’homme, l’aptitude à l’observation précise et à la critique judicieuse qui libère l’esprit ».
Une bibliothèque est créée, avec des revues, des ouvrages techniques élémentaires, des romans scientifiques : « En maintenant et en développant chez le jeune homme l’amour de la lecture, nous le préparons à puiser dans les livres de salutaires directions pour sa conduite et des secours efficaces dans l’exercice de sa profession ».
Les Ateliers-Ecoles s’efforcent de faire de leurs jeunes gens des hommes sains et vigoureux par une pratique judicieuse de l’éducation physique, par l’habitude d’une hygiène « préservatrice ».
L’exposition des travaux des élèves est édifiante.
En quittant les Ateliers-Ecoles, il est demandé aux apprentis de se faire inscrire aux Cours Professionnels de la Ville de Troyes, et de les suivre avec assiduité et application.
D’autre part, avec la collaboration de la Chambre d’Apprentissage de l’Aube, bien renseignée sur
les besoins régionaux du travail, tous les élèves sortants ont été placés.
A côté des ateliers de menuiserie, d’ajustage de métaux en feuilles, 3 nouveaux ateliers-types ont été ouverts la 2° année : un atelier de typographie, un atelier de papeterie-reliure, un atelier de bonneterie.
La 2° année, les professions désirées par les élèves et leurs parents se répartissaient ainsi : Mécanique-Ajustage 16, Métaux en feuilles 1, Menuiserie-Ebénisterie 12, Typographie 4, Papeterie-Reliure 2, Bonneterie 4, sans indication de profession 11. A la fin de la période d’orientation, professions acceptées par les familles : Mécanique-Ajustage 12, Métaux en feuilles 7, Menuiserie-Ebénisterie 13, typographie 8, Papeterie-Reliure 6, Bonneterie 4.
Pour l’avenir de l’œuvre, une question capitale se posait, celle des locaux. Elle étouffait au Groupe scolaire des Jacobins. Comment augmenter le nombre des ateliers types pour la prochaine rentrée ? Et si des ateliers pour jeunes-filles devaient être créés ? Est alors étudiée la possibilité d’une construction sur un terrain de 800 m², contigu à l’Ecole des Jacobins. Le Conseil municipal accepta de concéder à bail ce terrain, à titre précaire et révocable, pour une durée de 15 ans, moyennant un loyer de 1 fr. par an. La Direction Générale de l’Enseignement Technique étant disposée à participer jusqu’à 50 % de la dépense de la construction.
C'est ainsi que le « Centre public d’Apprentissage de Garçons Georges Pargeas » à Troyes devint il y a 70 ans, l’Etablissement Technique le plus important de la Région.
Le nom de ce centre est celui de son fondateur Georges Pargeas, à qui Troyes doit aussi ses habitations à bon marché ou à loyer moyen et ses Centres d’Apprentissage, transformation des anciens « Ateliers-Ecoles ».
Dès la fin de la première guerre mondiale, M. Pargeas pense que le problème de la formation professionnelle n’est pas résolu et que l’une de ses bonnes solutions réside dans l’apprentissage sous forme scolaire. Il fonde en 1923, la Chambre d’Apprentissage de l’Aube et lui assigne comme but essentiel la gestion des Ateliers-Ecoles qui s’installent avec les Cours Professionnels municipaux dans le groupe scolaire des Jacobins. Avec l’appui d’industriels, entrepreneurs, artisans et ouvriers, des municipalités de l’agglomération, des autorités préfectorales et académiques, les Ateliers-Ecoles accueillaient en 1929, comme écrit plus haut, une vingtaine de garçons de 13 ans.
En 1945, ayant surmonté les énormes difficultés que créent la pauvreté et la guerre, c’étaient plus de 250 jeunes gens qui, cessant d’être des apprentis des Ateliers-Ecoles, devenaient des élèves du Centre d’Apprentissage.
M. Pargeas fut le précurseur de l’Enseignement Technique ouvrier en France. Dès 1947, le Centre d’Apprentissage Pargeas s’installe à la Cité Beurnonville : direction, économat, cuisines, réfectoires, salles de classes et internat de 230 lits. On y rencontre les futurs électriciens-monteurs-installateurs, les bourreliers-selliers-garnisseurs, les imprimeurs-compositeurs en typographie, les mécaniciens-ajusteurs, conducteurs de machines-outils, réparateurs-automobiles, puis pour les garçons du bâtiment : maçons, menuisiers, charpentiers, plombiers-zingueurs, peintres-décorateurs.
Les garçons de 14 ans, un peu indécis, ont donc l’embarras du choix. On leur conseille d’aller au Centre d’Orientation Professionnelle de la cour de l’Ancien-Evêché pour y déceler leurs aptitudes physiques et mentales à l’exercice de tel ou tel métier.
Le Centre reçoit des élèves externes, ½ pensionnaires et internes. Les études sont gratuites (matière d’œuvre y comprise). La pension est de l’ordre de 54.000 francs par an pour les internes, mais l’Etat accorde, selon les ressources du demandeur, sans examen scolaire préalable, des bourses allant de moitié à la totalité. Emploi du temps : 44 heures de présence au Centre dans la semaine (plus que les parents).
Il y a peu de Troyens : 135 externes, 50 ½ pensionnaires et 230 internes. Sont en 4° année, les compositeurs-typographes et les dessinateurs industriels.
Le C.A.P. est l’examen sanctionnant les 3 années d’apprentissage.
Il y a des jeunes de l’Yonne, de la Nièvre, du Doubs, de la Côte d’or, de la Région parisienne…, si bien que les jeunes de la campagne auboise n’en dépassent pas la moitié.
Pour 150 admissions possibles annuellement, il y a plus de 320 candidatures à chaque rentrée ! Il faudrait pouvoir porter l’effectif du Centre à plus de 800 élèves, mais cela suppose beaucoup de problèmes dont celui financier.
Les jeunes trouvent en principe, un emploi sans difficulté, le Conseil d’Administration du Centre, où les organisations professionnelles patronales et ouvrières sont largement représentées, se tenant en liaison avec le Bureau départemental de la Main-d’œuvre et avec le CEIPA.
Le 29 juillet 1949, le conseil Municipal donne le nom de Georges Pargeas à une rue de Troyes.
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