La campagne d’Attila dans les Gaules a causé parmi les populations une impression si profonde, qu’aucune autre invasion n’a laissé de souvenir plus terrifiant ni plus vivace.
La défaite du roi des Huns dans le Campus Lauriacus est d’ailleurs l’un des événements les plus considérables de notre histoire, puisque la civilisation de l’Europe occidentale échappait ainsi à l’anéantissement prémédité par les hordes barbares.
L’invasion des Huns constituait une menace importante, aussi bien par le nombre des envahisseurs qu’en ce qui concerne ses conséquences immédiates. En effet, en cas de victoire définitive, les hordes innombrables des barbares asiatiques, refoulés depuis les lointaines régions nordiques, auraient littéralement submergé le territoire des Gaules, dispersant ou détruisant les populations autochtones, brûlant les villes et les agglomérations rurales, détruisant les récoltes, abattant le bétail. Puis, poussant à l’ouest jusqu’à l’océan, les tribus nomades se seraient nécessairement fixées sur le sol qu’elles venaient de conquérir. C’était en perspective la destruction inévitable de la civilisation chrétienne et l’établissement de l’arianisme.
Je pense que peu de lecteurs connaissent la vie d’Attila.
L’histoire de la campagne de 451 a été singulièrement déformée par les récits postérieurs aux événements. En ce qui concerne la défaite d’Attila connue sous le nom de bataille des champs catalauniques, de récents travaux permettent d’approcher au plus près de la vérité.
Les hordes barbares qui franchissent le Rhin au milieu du V° siècle pour envahir les Gaules sont composées de peuplades nordiques.
Attila naît sur les bords du Danube, vers 395, descendant de l’antique famille impériale qui règne sur la puissante nation des Huns. Il y fait son apprentissage d’homme, il apprend l’art de la guerre et prend réellement contact avec le monde européen. A cette époque, la diplomatie romaine, par le système des otages, pratique une sorte d’échange entre la barbarie et la civilisation. Rome reçoit à la cour impériale de jeunes princes barbares et en contre-partie, envoie chez ses alliés des enfants de nobles familles patriciennes. Attila, âgé d’une douzaine d’années est envoyé à la cour d’Honorius qui reçoit en échange Aétius jeune praticien du même âge. Les jeunes otages barbares sont les hôtes de l’Empereur et suivent la cour à Rome et à Ravenne. Brusquement transplanté des chariots de la plaine danubienne dans les palais romains, Attila ne peut s’habituer au luxe et au raffinement de cette civilisation. Il étudie la langue latine et porte le costume romain, mais il observe ses hôtes, surprend les intrigues et se rend compte de la situation de l’Empire. Il découvre l’incapacité des empereurs, la corruption des fonctionnaires, l’absence de tout sens moral chez les citoyens... tout ce que plus tard il sait exploiter d’une manière géniale, qui lui sert à réaliser ses plus audacieux desseins.
Priscus, sophiste grec et historien du Ve siècle, écrit en 449, que le roi des Huns est court de taille, large de poitrine, avec une tête énorme, un teint basané, à la barbe noire et rare, avec des yeux petits et bridés… Sa puissance apparaît surtout dans sa démarche superbe, l’aisance de ses mouvements et la dureté de son regard. Bien que sa vie se soit presque entièrement passée dans les batailles, Attila combat rarement de sa personne. Il reste le général qui commande, il préfère la ruse, la persuasion ou l’intimidation à la violence délibérée. Il songe à soumettre les peuples slaves et germaniques, à abattre la puissance de l’Empire, et riche des dépouilles de Rome et de Byzance, s’emparer de l’Asie, écraser Genséric en Afrique et finalement partir à la conquête du monde.
Au cours de l’hiver 450-451, Attila détruit les forteresses romaines édifiées sur le Danube et se dirige vers le Rhin. Les populations gallo-romaines, frappées de terreur, abandonnent leurs villages et se réfugient dans les forêts. Méry-sur-Seine s’appèle autrefois, Mauriacum, et la plaine qui l’environne : Campus Mauriacus. C’est dans cette grande plaine que, venant d’Orléans, les armées ennemies s’affrontent. Avant d’engager le combat, Attila consulte ses dieux en sacrifiant des victimes humaines sur de grosses pierres brutes, situées près de Pont-sur-Seine. D’ailleurs, dans cette partie de la Champagne, on trouve fréquemment des pièces de monnaie portant sur l’une de ses faces " Atteula ", soit Attila dans le langage des Huns.
Dans un grand ouvrage intitulé " Gesta Francorum ", il est écrit : " on s’est battu dans les champs Mauriacus, situés dans le pays des Tricasses, du diocèse de Troyes, mais c’est dans les champs catalauniques que se place la bataille à la suite de laquelle Attila vaincu, quitte les Gaules ". Il y aurait eu 500.000 hommes pour chaque belligérant, et un véritable carnage : 300.000 tués. Vaincu et repoussé vers la Seine, le roi des Huns, fait massacrer le diacre Memorius (voir le chapitre Saint-Loup) et ses compagnons au village de Saint-Mesmin, situé sur la rive gauche du fleuve, et pour le traverser, il utilise les ponts de Troyes. Au moment de l’invasion des Gaules par Attila, un faisceau de voies romaines vient de part et d’autre de la métropole des Tricasses (Augustobona), et se réunit en une chaussée unique pour traverser la Seine sur un pont situé à proximité de l’ouvrage portant aujourd’hui le nom de Pont-Hubert. A la sortie de Pont-Hubert, les routes forment un faisceau se dirigeant vers 4 points différents : la voie d’Agrippa vers Arcis-sur-Aube, la voie de Troyes dite voie de Rhèges, qui se sépare de la voie d’Agrippa dès sa sortie de Pont-Hubert, pour suivre la rivière d’Aube, ligne de partage des eaux des bassins de la Seine et de la Barbuise. La voie de Troyes vers Wassy débouche de Pont-Hubert, se dirige vers l’Est et porte encore sur la plus grande partie de son parcours , le nom de chemin des Romains. La voie de Troyes vers Wassy, traverse Creney.
Attila fait exécuter plusieurs de ses vassaux germaniques. L’un a une fille Ildico, d’une remarquable beauté. En 453, il décide d’en faire son épouse, l’enlève de force et l’emmène dans sa capitale où son peuple se prépare joyeusement à célébrer les noces royales. Après avoir fêté joyeusement son mariage et avoir bu de nombreuses boissons en l’honneur de la nouvelle épouse, Attila se retire dans la chambre nuptiale, " sa tête était chargée de vin et de sommeil ".
On ne sait exactement ce qui se passe entre les 2 époux au cours de cette nuit tragique nuit de noces, mais le lendemain, lorsque ses familiers, inquiets de ne pas voir paraître leur maître, forcent les portes et pénètrent dans l’appartement royal, ils trouvent Attila étendu sur sa couche, au milieu d’une mare de sang, et Ildico assise près du lit, pleurant sous ses voiles d’épousée. A-t-il été frappé au moyen d’un couteau par sa jeune femme alors qu’il est endormi ? Sujet à des saignements de nez, a-t-il été surpris par une hémorragie alors qu’il était sur le dos et que le sang l’a étouffé ? La tradition germanique attribue à Ildico le meurtre de son mari.
La mort d’Attila a définitivement fait disparaître la sorte d’épouvante suspendue pendant 20 ans sur le monde romain.
Sur le bandeau du bas de chaque page, vous cliquez sur "Plan du site", qui est la table des matières, et vous choisissez le chapitre qui vous intéresse.
Cliquez sur "Nouveaux chapitres" vous accédez aux dernières pages mises en ligne.