Les juifs ont, au moyen âge, à Troyes, des établissements considérables.
Le commerce important qui se fait dans la capitale de la Champagne y attire cette race financière et marchande, chassée et rappelée tour à tour, suivant que la haine populaire ou l’intérêt pécuniaire des nobles venait à triompher.
Il ne faut pas oublier l’académie juive de Troyes où les études sont florissantes, et la renommée du Rabbin Raschi.
Il n’y reste cependant que de rares et faibles traces de l’existence des juifs.
Un seul document, par sa date et son contenu, a été trouvé jusqu’à présent, dans les Archives de l’Aube.
C’est un mandement du roi Philippe le Long, adressé le 26 février 1620 au bailli de Troyes, afin que, « de concert avec le Prieur des Dominicains, le gardien des Cordeliers, et d’autres personnes ecclésiastiques de probité », il ait à réprimer les excès commis par les juifs.
Ils ne sont rentrés que depuis 5 ans en France, et déjà ce mandement les représente comme assez forts pour se soustraire aux règlements qui leurs sont imposés.
Ils ne portent plus la marque destinée à les faire reconnaître, et, affranchis de cette distinction incommode, ils se mêlent ouvertement aux réunions des chrétiens, hors de leur quartier, dans les maisons, et jusque dans les églises, où, à leur arrivée, les personnes pieuses, et les prêtres eux-mêmes, se lèvent souvent par respect, les prenant, à leur faste et à leur cortège opulent, pour de hauts et puissants personnages.
Ils montrent une telle arrogance, dit le mandement du roi, qu’ils ne craignent pas d’irriter les catholiques par les cris lamentables qu’ils poussent dans leurs synagogues de la Juiverie, qui sera plus tard la paroisse Saint-Frobert. Les hurlements, se mêlant au chant des offices célébrés par les Cordeliers, leurs plus proches voisins, par les Dominicains, beaucoup plus éloignés, et par les prêtres attachés aux autres églises bâties dans les environs, troublent l’attention des assistants, et les empêchent de prêter l’oreille aux louanges divines.
Une telle conduite au milieu d’une population naturellement hostile, serait inexplicable, s’il n’était à peu près certain que les juifs se trouvaient les créanciers de la plupart de leurs ennemis.
Peut-être aussi, moyennant finance, avaient-ils obtenu quelques privilèges, dont ils usaient largement.
Au moins, le mandement le donne à penser, puisqu’il enjoint au bailli de ne tenir aucun compte de ceux qu’ils pourraient avoir, de les contraindre à reprendre leur marque distinctive, et de les châtier si rudement, pour leurs excès passés, qu’ils perdissent l’envie d’en commettre de semblables à l’avenir.
Le mandement est sur parchemin.
En plusieurs endroits, il semble avoir été rongé par des rats. « Il est scellé sur simple queue », il n’y reste qu’un fragment du sceau en cire blanche.