Voici un fait authentique, extrait des Archives judiciaires du Tribunal civil de Troyes.
Au temps de la féodalité, notre département est parsemé de nombreux châteaux, dont quelques uns ne sont disparus que vers la fin du XIX° siècle.
Cela se passe en 1712. Le château de la Maison des Champs est alors situé à l’extrémité de ce village, à la lisière d’un grand bois. Depuis, une ferme a été construite à son emplacement.
Pendant longtemps vécut au château Marie-Anne de Ravinel, mariée au marquis de Mareuil, d’abord séparée de son mari, puis devenue veuve.
Le mobilier de la marquise est celui d’une femme qui a fréquenté le monde élégant, de très beaux et nombreux bijoux sont déposés dans des coffres, de riches tentures ornent ses appartements, et aux murs sont suspendus des tableaux de prix. La marquise de Mareuil décède en 1711. Elle laisse un héritier collatéral et des créanciers.
Les officiers de justice du siège de Bar-sur-Aube laissent au château un gardien et l’héritier. Les opérations se tiennent en février, avec un temps déplorable, un fort vent, de grandes pluies… Chaque soir, l’héritier et le gardien vont se reposer dans leurs chambres respectives. Le gardien qui n’est pas habitué à vivre dans une grande demeure, a très peur.
Plusieurs nuits, blotti dans son lit, il croit entendre un bruit étrange : dans la galerie résonnent des pas lourds et mesurés, des frôlements de chaînes de fer sur les planchers… Est-ce la marquise qui a quitté sa tombe pour revoir encore sa dernière demeure ? Est-ce quelque ancien seigneur qui visite son vieux logis ? Enfin, quel est l’auteur de ce bruit sinistre ? Un bruit de pierres qui s’entrechoquent lui fait croire que la muraille s’écroule. Glacé d’épouvante, il n’ose quitter son lit. Il attend avec effroi et impatience la levée du jour. Là, il sort de sa chambre, l’esprit plein des émotions d’une nuit sans sommeil et du bruit qui retentit encore à ses oreilles. Il examine les murailles, elle sont encore debout. Il cherche quelques trappes secrètes, il ne trouve pas la moindre fissure dans le plancher, pas un trapan n’est déplacé, il ne voit pas trace de feu, il ne sent pas l’odeur du soufre…
Son compagnon est encore au lit. Il va le trouver et le questionne. Celui-ci n’a rien vu, rien entendu. Quel mystère ! Plusieurs nuits se succèdent et le même bruit frappe ses oreilles : quelle cause donner à ces faits étranges ? Les hommes de loi eux-mêmes ne peuvent s’expliquer les visions de celui à qui ils ont confié la garde du château.
Un jour, l’héritier les prévient qu’il est obligé de quitter le château. Il leur dit adieu et part.
La description mobilière n’en continue pas moins. On arrive bientôt à l’appartement de madame la marquise. Les scellés sur les portes sont reconnus intacts. Chaque coffre, chaque armoire est à sa place et porte l’empreinte du sceau de la justice.
Enfin, on ouvre un coffre : il est vide ; une armoire, vide encore ; tous les meubles sont vides.
L’étonnement est grand, mais le vide n’est que trop réel. L’un des officiers de justice, plus avisé que les autres (il avait souri au récit du gardien), explique l’énigme dont le mot n’est pas difficile à trouver, après avoir découvert que le fond des meubles ne tenait plus, qu’un trou masqué par des meubles existe dans la muraille et donne entrée dans l’appartement.
Alors, tout s’explique, le bruit des chaînes, celui de la muraille qui s’écroule, le besoin que trouve l’héritier pour quitter le château. Il sait que des créanciers veulent faire main basse sur la succession. Il profite des nuits sombres, il effraie le gardien et s’empare du plus clair et du meilleur de la succession !
Nul, depuis son départ, n’entendit parler de l’héritier !!
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