Politique



Assainissement financier février 1945 - juin 2020


Assemblée consultative
Assemblée consultative

Le 17 février 1945, la presse troyenne reprend les écrits de la presse nationale, dans un article à « la une », intitulé : « Suggestions pour l’assainissement financier ».

 

Les dirigeants français de 2020 s’apercevront, en lisant cet article, que 75 ans après, ils sont dans la même situation.

 

En voici le texte :

 

« Un intéressant débat vient de se dérouler à l’Assemblée consultative provisoire au sujet des mesures à prendre pour réaliser l’assainissement financier.

 

Celui-ci ne sera pas facile à mener à bien si l’on tient compte que les dépenses prévues au budget de 1945, sont de l’ordre de 500 milliards tandis qu’on n’escompte que 150 milliards de recettes. Ceci indique donc bien qu’on ne pourra aboutir qu’en prenant des mesures tout à fait exceptionnelles.

 

Essayer de s’en tirer par des faux-fuyants, par des demi-mesures, est impossible et ne ferait que précipiter la catastrophe financière que seules des mesures de « salut public » peuvent empêcher ou tout au moins limiter.

 

Au cours du débat à l’Assemblée, Jules Moch (plusieurs fois ministre sous la 3° et la 4° République, opposant à l’union de la Gauche) a analysé celles qu’il préconisait et l’accueil qui lui a été fait semble bien indiquer que l’immense majorité est décidée à les faire siennes, avec peut-être quelques modifications.

 

L’augmentation des dépenses civiles :

 

L’orateur a tout d’abord constaté que les dépenses civiles ont été quintuplées depuis 1939 par l’inflation du personnel et qu’elles sont de l’ordre de 25 milliards. Il demande donc la simplification des services, la suppression des organismes faisant double emploi… et qui bien souvent s’ignorent, ce qui permettrait d’abattre plusieurs milliards.

 

Il préconise :

1) Une réforme fiscale modifiant le régime de l’impôt sur le revenu par la suppression des cédules (écrit établi dans le cadre d’une reconnaissance de dette) et l’établissement d’un impôt unique avec stoppage à la source.

2) Un échange des billets de banque, avec un blocage qui établirait un plafond de dépenses et aurait pour effet de tarir le marché noir.

3) Un inventaire des comptes en banque.

4) Le dépôt des titres principaux et leur passage à la forme nominative. 5) L’établissement du casier fiscal, ce qui permettrait de créer, notamment pour financer la reconstruction, 4 taxes de guerre exceptionnelles.

 

Ces 4 taxes seraient les suivantes :

 

Une taxe sur la fortune, avec à la base, une exonération de 300.000 francs par majeur et 200.000 francs par mineur.

 

Une taxe sur les enrichissements réels, taxe progressive pouvant aller jusqu’à 75 % pour les enrichissements de plus de 5 millions quand la fortune a été quintuplée depuis 1939.

 

Une taxe de solidarité sur les plus-values apparentes résultant de la hausse des prix, avec là encore, un abattement identique à celui de la taxe sur la fortune et par le jeu duquel, sur 4 millions d’exploitants agricoles, par exemple, plus de 2.600.000 exploitations seraient exonérées.

 

Enfin, la dernière taxe qu’il propose – et ce ne serait pas la moins populaire – serait la confiscation pure et simple, intégrale des enrichissements illicites.

 

L’ensemble de ces 4 taxes donnerait, selon Jules Moch, 225 milliards que l’on pourrait faire rentrer en 2 ans.

 

Sacrifices passagers :

 

Ces mesures, si elles étaient appliquées, épargneraient les petits et moyens possédants. Elles seraient dures pour les gros, mais elles seraient bien préférables à une faillite monétaire complète.

 

L’incertitude actuelle crée dans le pays un malaise réel qu’il faut dissiper rapidement si l’on veut que la nation renaisse : seules des mesures de l’ordre de celles exposées ci-dessus peuvent y parvenir.

 

Et l’enjeu vaut bien quelques sacrifices… passagers ».

 

 


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