La plus ancienne charte retrouvée date de 1180 : Troyes a sa commune et ses maires.
Une charte de 1187 est signée par le témoin « Luca Gener, tunc temporis Trecensis communie villicus, Lucor major trecensis », que l’on peut traduire « Luc maire de Troyes ». En effet, « villicus » a été employé dès le XI° siècle comme synonyme de « major ».
Organisée en commune au XII° siècle, cette institution disparait dès le commencement du siècle suivant. Ainsi, dans les actes où les habitants de Troyes comparaissent pour la défense de leurs intérêts, il n’est plus question ni de la commune, ni de son représentant naturel, le maire. Au lieu du maire, on trouve le prévôt, c’est-à-dire le principal représentant du seigneur, officier spécialement investi d’attributions judiciaires.
En 1215, Troyes a ses échevins.
En 1217, les bourgeois de Troyes, ayant à leur tête le prévôt du comte, formaient une personne morale appelée « censiva », et qui avait un sceau.
Dans une charte de 1222, où les intérêts de la ville sont directement en jeu, on voit comparaître « prepositus, et burgenses Trevenses ». L’association des 2 mots de prévôt et d’échevins dénote une situation mixte. Troyes n’a plus ni maires ni échevins.
« Censiva » est le terme reçu pour désigner l’être débiteur d’un « cens », c’est-à-dire d’une redevance annuelle, fixe et invariable. Cette redevance que Troyes payait au comte, était le résultat de l’abonnement des amendes de justice. Ces amendes étaient cédées aux habitants, constitués en une sorte de personne morale, qui n’était pas la commune, mais s’en rapprochait. Elle payait chaque année au comte une somme préalablement déterminée par une convention arrêtée entre ce prince et les habitants. Cette somme portait le nom de « cense », de là celui de « censive » donné en 1217 à la personne morale qui payait cette somme.
En septembre 1230, Thibaut IV, comte de Champagne, donna une charte à « ses hommes et femmes » de Troyes, qui étaient sous sa dépendance directe. Il y en avait un certain nombre qui appartenaient à des seigneurs particuliers tels que l’évêque et des communautés religieuses.
Thibaut venait de réduire une coalition formée contre lui par ses barons, et la fidélité des habitants de Troyes facilita le dénouement heureux de cette campagne. La concession d’une charte a donc été pour les Troyens la rémunération d’un service rendu, et en même temps pour le comte un moyen de se ménager leur appui, pour l’avenir, en pareilles circonstances.
La charte de septembre 1230 est en langue française : 13 bourgeois sont nommés chaque année par le comte, et ils choisissent l’un d’eux pour « maire » dans la quinzaine qui a suivi leur nomination, sinon ce choix est fait par le comte, toujours parmi eux. Les 12 autres sont appelés « jurés », à cause du serment qu’ils prêtent au comte. Le comte accorde à l’échevinage la juridiction sur les autres bourgeois et les produits de justice moyennant une rente appelée « cense » de la commune. La « taille », impôt essentiellement arbitraire, est supprimée et remplacée par un impôt de quotité, suivant un tarif fixe, appelé « jurée », parce que le contribuable attestait par serment la sincérité de la déclaration faite par lui pour servir de base à l’assiette de l’impôt. Elle sera levée par les jurés. En 1230, la commune est constituée, cette administration dure 12 ans.
En décembre 1242, Thibaut IV donne aux Troyens une nouvelle charte, qui est l’arrêt de mort de la commune. Il n’y est plus question de maire ni de commune, le tarif de la taille institué en 1230 est maintenu et l’impôt continuera à être levé par 12 jurés, mais ils n’ont plus d’attributions judiciaires. Avec cette nouvelle charte, les habitants de Troyes se trouvaient donc dans une situation à peu près semblable à celle qui avait précédé la charte de 1230, la jurée avait simplement été substituée à l’ancienne taille.
Les dettes de la ville ne furent éteintes qu’en 1270, sur l’intervention de Thibaut IV, qui s’engagea envers les habitants à leur en faire restituer les titres constitutifs. Ils furent autorisés par Thibaut IV, en 1270, à nommer un « prud’homme » chargé d’administrer, de concert avec un autre prudhomme nommé par le comte. Ils connaîtront des dépenses et des recettes, et des fonds affectés à l’entretien des chaussées et au service du guet de la ville. C’est l’origine de l’institution des voyeurs qui jouèrent, pendant longtemps, un rôle important dans la vie intérieure de la cité. La voirie est donc constituée, et la ville a un officier chargé de veiller à sa sûreté. Celui-ci doit compte de sa gestion à tous les habitants réunis en assemblée générale, le 11 juin de chaque année.
En 1317, on retrouve un Conseil de ville composé de 12 habitants, élus par leurs concitoyens et dits : « Les Elus du commun ». Ce même conseil existe en 1354, 1358 et 1638. Les attributions sont autres que celles des « Voyeurs », et, en dehors de ce conseil, agissent et fonctionnent les « Maîtres des œuvres », chargés de la construction et de l’entretien des fortifications, ayant leurs ressources financières principales dans les droits de moulage, perçus sur les grains moulus dans les moulins de la ville. La ville n’a pas encore de clerc, les procès-verbaux des assemblées sont rédigés par 2 ou 3 notaires, sous le sceau de la prévôté ou sous celui des foires.
En 1358, le Conseil de ville compte 26 membres élus. Il décide alors l’acquisition d’armes nécessaires à la défense de la ville, comme au service du roi.
En 1367, le Conseil de ville est réduit à 12 membres.
En 1375, la ville a son « Receveur » à qui les habitants confient l’office de clergie, c’est-à-dire le soin de faire les écritures et de conserver les titres communs. Le receveur est institué par le bailli, seul, mais « du consentement et à la requête tant des élus au Conseil pour le fait et les besognes de la ville, que de plusieurs des autres clercs, bourgeois et habitants ». Il ne peut recevoir ni payer que sur les mandements ou certificats des élus du clergé, des bourgeois et des habitants. Pour les dépenses relatives aux fortifications, les mandements doivent être signés du bailli et des maîtres des œuvres. Les comptes sont reçus, vérifiés et arrêtés publiquement par des habitants choisis à cet effet.
En 1412, les habitants ont besoin d’emprunter pour les travaux des fortifications. La résolution est prise dans une assemblée de plus de 1.000 habitants, tenue au palais royal, qui autorise le receveur de la ville et Colinet Mauroy, à emprunter 1.000 livres de l’évêque, Etienne de Givry. Acte de cette assemblée est dressé par 2 notaires, sous le sceau de la prévôté.
En 1424, pour exécuter les décisions des notables et de la communauté, les habitants, de par les 3 Etats, en assemblée générale, élirent 30 personnes notables d’entre eux, tant d’église que séculiers, auxquels il fut donné de représenter la ville, de traiter, de délibérer et de conclure sur toutes les affaires communes. Le Conseil ainsi constitué, de par les habitants et sans mandement royal, fonctionna à peu près sans interruption jusqu’en 1470.
En 1458, le nombre des membres du Conseil est fixé à 26, dont 6 membres sont pris parmi le clergé. L’élection est fixée au jour de la Saint-Barnabé. Les réunions ont lieu de 15 jours en 15 jours, en la salle du roi. Il est distribué aux membres présents 12 sous 6 deniers.
Louis XI accorde aux habitants de Troyes des lettres d’échevinage en 1470. Les Troyens peuvent s’assembler au son de la cloche et élire 36 habitants, dont 12 composeront le corps de l’échevinage, les autres demeurant conseillers. Les échevins choisissent parmi eux « un chef et président ayant la prérogative de proposer, de mettre en avant les matières, besognes et affaires communes et de recueillir les voix des échevins et conseillers ». Ils auront l’administration des affaires de la ville, l’ordonnance et la distribution des deniers communs et d’octrois, et avec les conseillers, ils nommeront le receveur des deniers communs et tous autres officiers. Si l’importance des affaires l’exige, le bailli peut autoriser une assemblée générale des habitants. La police de la ville est confiée aux échevins. Ce premier échevinage dura 3 ans. Après s’être fait payer cette concession 1.500 écus, Louis XI le supprima. De nouvelles lettres, pour le rétablissement de l’échevinage, obtenues en 1481, ne purent être enregistrées au Parlement qu’en 1493, pas suite de l’opposition des officiers royaux du bailliage. Par ces lettres, les Troyens sont autorisés à élire 1 maire, des échevins et des conseillers de ville. Louis XI, reconnaissant que « les besognes et affaires communes de la ville demeurent en souffrance », déclare qu’il y a lieu de remettre à exécution ses lettres de 1470. Il établit 1 maire et 8 échevins. La durée des fonctions de maire est fixée à 2 ans, avec continuation d’une autre période d’une égale durée, si les habitants le jugent utile. Les maire et échevins ont juridiction de police. Ils ont le droit d’examiner et de clore les comptes. Les gages de tous les officiers de la ville, voyeurs, receveur, maître des œuvres, concierge, sergents, sont fixés par l’assemblée générale de la Saint-Barnabé. Si cette assemblée décide qu’aucun gage ne sera accordé à des officiers, ceux-ci ne devront en toucher aucun. Le Parlement n’enregistra les lettres du roi qu’en 1493, après qu’elles eussent été confirmées par Charles VIII. La ville n’en fut pas moins administrée par 12 échevins assistés d’un conseil. Ces lettres furent exécutées pendant 2 siècles complets, et ce fut le beau temps de l’administration de la ville, car c’est surtout pendant le XVI° siècle que s’élevèrent la plupart de nos édifices publics, que l’instruction fut répandue dans toutes les classes de la société, que les arts prirent le plus grand développement. Le clergé cessa de prendre part à l’administration de la ville en 1525. Sous Louis XIII et Louis XIV, il reparait à certaines époques. Une seule fois, Henri III se fit présenter une liste de 4 noms, parmi lesquels il désigna le maire. En 1596, il fut décidé en Conseil que nul ne pourrait être maire, s’il n’est né à Troyes, et s’il n’a au moins 10 ans de résidence.
La lutte entre le pouvoir royal et l’autorité échevinale commence en 1586. En 1620, un arrêt du Conseil modifie profondément les relations des 2 autorités. L’élément royal s’introduisit légalement dans l’administration des intérêts communs des habitants, et la lutte se poursuivit avec acharnement. L’élection des conseillers est restreinte. Les électeurs ne sont plus que le maire et les échevins, les conseillers restants et 16 notables : 8 échevins anciens et 8 bourgeois. La nomination des maires par voie d’élection fut annulée. Le roi demande, pour choisir, la présentation d’une liste de 3 noms en 1629, 1631, 1632, 1640, 1644 et 1648. En 1692, suppression complète des offices municipaux. L’élection est abolie. Le maire devient un officier royal, propriétaire de son office, acheté moyennement la somme de 36.000 livres. Il est appointé annuellement de 1.440 livres. Les offices, rachetés en 1722, furent de nouveau supprimés en juillet 1724, et rétablis en 1733. Par les édits de 1764 et de 1765, l’administration municipale des villes au-dessus de 4.500 âmes fut modifiée. « Le bureau de l’hôtel de ville » fut composé d’un maire, de 4 échevins, de 6 conseillers de ville et de 14 notables, le maire étant choisi par le roi dans une liste de 3 candidats. En 1771, le roi révoqua ces 2 édits, et les offices municipaux furent une fois encore convertis en offices royaux. Par un règlement de décembre 1773, le roi pourvoit de nouveau à l’administration de la ville : le bureau ordinaire de l’hôtel de ville est composé d’un maire, de 4 échevins, d’un procureur-syndic, d’un secrétaire-greffier et d’un receveur. Un conseil général est formé de 16 notables et du maire sortant.
C’est en cet état que se trouvait notre municipalité en 1789.
Le plus ancien sceau connu de la ville de Troyes est appendu à une charte de 1232 conservée aux Archives Nationales. Le maire avait un sceau distinct de celui de la commune.
Voir ci-contre le sceau de Gérard Mélataire, maire de Troyes en 1231, et le sceau et le contresceau de Bernard de Montcuc, maire de Troyes en 1240. Ce sceau porte un écu parti de Navarre et de Champagne : Thibaut IV, le premier de sa maison, était en effet monté sur le trône de Navarre en 1234.
L’autre sceau
ci-contre, de Pierre des Bordes, maire de Troyes
en 1241, est appendu à une charte de mars 1240, conservée aux Archives de
l’Aube.
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