Le prieuré de Sainte-Scholastique était sis sur la commune de Rosières, entre le village de Rosières et le hameau de Viélaines, sur la paroisse de Saint-André. Avant de s’appeler Sainte-Scholastique, le prieuré portait le nom de Notre-Dame-de-la-Prée, et était occupé par les Chartreux, qui en prirent possession le 9 janvier 1331, et y demeurèrent jusqu’en 1621. Cette année-là, les Chartreux se retirèrent au faubourg de Croncels de Troyes, au lieu-dit l’Echerelle qui leur avait été donné par MM. Largentier, avec promesse de les aider à bâtir une église et les autres lieux réguliers, et même d’augmenter assez les revenus de la communauté pour élever les religieux au nombre de 24. A cette époque, Mme Le Mairat eut la pensée de fonder un prieur de femmes, soumis à la règle Bénédictine, dans l’ancienne Chartreuse de La Prée. Fille de Louis Le Mairat, sieur de Droupt, et de Louise Perricard, veuve de Nicolas Largentier, notaire et secrétaire du roi, maison, couronne de France, seigneur de Vaucemain, vicomte de Neufchâtel, baron de Chapelaines, Vernon, Chamoy, Vauchassis, Laines-aux-Bois, Marie Le Mairat jouissait d’une grande fortune, car sa mère Louise Perricard, lui avait légué tout le patrimoine de famille en déshéritant son fils, le père Le Mairat, « parce qu’il avait embrassé la vocation de Jésuite, du tout odieuse et réprouvée en France ». En 1626, Marie Le Mairat demanda aux Chartreux de lui céder Notre-Dame-de-la-Prée moyennant 10.000 livres, ou 600 livres de rente annuelle. Le 27 septembre, René de Breslay, évêque de Troyes, autorise la fondation d’un prieuré de Bénédictines à Notre-Dame-de-la-Prée, avec ce considérant : « Qu’il désire qu’une église où Dieu a été si bien servi et honoré, et que le lieu des sépulcres de ceux qui l’ont honoré, ne soient pas profanés ». Par le même acte, l’évêque consent que « les aînés de la famille des fondateurs auront sur le nouveau prieuré le droit de patronage à perpétuité, les mâles aux femelles par préférence ». En novembre, l’autorisation est donnée par le général des Chartreux, et le 1er décembre Marie Le Mairat par contrat passé en son hôtel, rue de Croncels, fonde le prieuré dit d’abord de Notre-Dame-Largentier, et ensuite de Sainte-Scholastique « et pour cet effet donne en pur don Noter-dame-de-la-Prée, consistant en une chapelle et 2 pavillons, dans lesquels il y avait 6 chambres tant hautes que basses, et au bas desquelles il y avait une galerie construite de bois ». Les enfants de Marie Le Mairat, Louis Largentier, baron de Chapelaines, et Charles Largentier, abbé de Notre-Dame-de-l’Absie-en-Gatine, diocèse de La Rochelle, contribuèrent à la fondation de Sainte-Scholastique en consentant aux donations de leur mère. De plus, le baron de Chapelaines donna 18.000 livres. Le 4 décembre, Elisabeth Largentier, fille de Marie Le Mairat et sœur des MM. Largentier, recevait la bénédiction religieuse et prenait possession de Sainte-Scholastiques, en qualité de prieure. Les religieuses de la nouvelle fondation ayant pris la règle de saint Benoît, étaient astreintes à la clôture et à l’office de choeur, et s’occupaient aussi de l’éducation des filles de bonne famille.
Principaux faits des prieures qui dirigèrent cette maison :
Elisabeth Largentier (1626-1645) : en 1628, elle accepte de Marie Le Mairat ses droits seigneuriaux à Saint-Pouange, avec une ferme. En 1634, il y a 50 religieuses. Le prieuré est entouré de fossés, entourés d’un petit enclos. En 1641, le roi Louis XIII confirme l’établissement du prieuré de Sainte-Scholastique « à la charge du droit de visitation de l’évêque de Troyes ».
Marie Largentier de Chapelaines (1645-1651) : résigne en faveur de Claude de Vaudrey, de l’ordre de Fontevrault, qui habitait au château de Saint-Phal, puis révoque cet acte.
Louise Largentier de Chapelaines (1651-1663) : administrant arbitrairement, l’évêque de Troyes, François Malier du Houssay, interpose son autorité pour arrêter les abus. En 1657, un arrêt royal permet à l’évêque de Troyes de donner l’habit aux religieuses.
Appoline de Housset (1664-1680) : était religieuse professe de Notre-Dame-des-Prés. L’évêque de Troyes Malier du Houssay donne des ordres pour les élections à l’intérieur du prieuré.
Françoise-Dantisse de Mansan (1680-1691) : demande au Saint-Siège de passer de l’ordre de saint Bernard à celui de saint Benoît.
Catherine de La Ferté (1691-1701) : était religieuse professe de Notre-Dame -aux-Nonnains.
Marie-Angélique de la Chaussée d’Eu d’Arrest (1701-1717) : Denis-François Bouthillier de Chavigny, évêque de Troyes, la nomme prieure de Sainte Scholastique. C’est la sœur de Marie-Madeleine-Marguerite de la Chaussée d’Eu d’Arrest, abbesse de Notre-Dame-aux-Nonnains. Marie-Angélique nommée par le roi abbesse de Notre-Dame-aux-Nonnains en 1717, fait cession du prieuré de Sainte-Scholastique à Marie Riberolles.
Marie Riberolles (1718-1733) : elle est la sœur de Gabriel de Riberolles, abbé général de Sainte-Geneviève de Paris. Commence alors une période de désastres qui aboutit à la ruine totale du prieuré de Sainte-Scholastique, et la maison est obérée de dettes. Les religieuses qui étaient 50 depuis 1635, ne sont plus que 25 en 1732, et le revenu annuel du prieuré atteint à peine 2.500 livres. En 1727, pour obvier au mauvais état des affaires de Sainte-Scholastique, Bossuet, évêque de Troyes, unit ce prieuré à celui de Saint-Jacques-du-Haut-Pas de Barbonne. En 1732, presque toutes les constructions de Sainte-Scholastique furent la proie des flammes. Bossuet, évêque de Troyes adressa au cardinal Fleury une demande de secours : « le feu prit vers minuit la nuit du 5 au 6 janvier, dans l’apothicairerie, sous le dortoir des religieuses qui eurent à peine le temps, ainsi que les pensionnaires, de s’éveiller, de se lever et de se sauver, la plupart en chemise… La supérieure, Mme de Riberolles, 25 religieuses, 4 converses du voile noir et 2 du blanc, sont sans asile. La chapelle extérieure de St Bruno et le petit parloir sont épargnés par les flammes…». L’intention du garde des sceaux était de faire supprimer immédiatement le prieuré, mais sur les instantes réclamations de l’évêque de Troyes, il consent à laisser reconstruire une partie des bâtiments, mais à condition qu’on ne reçoive plus de novices à l’avenir. Le roi accorda un secours annuel de 1.800 livres pour subvenir aux besoins des religieuses restées dans le prieuré. Bossuet obtient la démission de Marie de Riberolles.
Marie-Louise de Rohan-Chabot (1733-1743) : « fameuse janséniste, mais pleine de piété et de charité ». En 1734, une lettre de cachet du Garde des Sceaux défend à la supérieure de recevoir les religieuses sorties de Sainte-Scholastique. En 1735, il ne reste au prieuré que la prieure, 10 dames, 5 converses, 1 chapelain, 1 homme d’affaires et 5 domestiques. En 1741, les administrateurs des hôpitaux de Troyes adressent au roi une requête dans laquelle ils demandent la suppression de Sainte-Scholastique et son union aux hôpitaux. A cette date, il y a 21 religieuses de chœur et 3 converses. En 1742, le roi Louis XIV nomme économe de Sainte-Scholastique le sieur Paillot, à charge « de rendre bon et fidèle compte à l’évêque de Troyes ».
Le prieuré touchait à sa fin : au mauvais état des affaires se joignaient de violentes divisions intestines entre la prieure et ses religieuses relativement aux doctrines jansénistes. Enfin le roi, par lettre de cachet de juin 1743 disperse les religieuses de Sainte-Scholastique en divers monastères, et ferma le prieuré. Une main reconnaissante a gravé sur une pierre à côté de la porte d’entrée du prieuré ces mots qui valent une histoire : « Le 25 juin 1743 les religieuses sont sorties de cette maison, regrettées du riche et du pauvre ».
Par lettres du 28 décembre 1762, le roi ordonne « que par le sieur évêque de Troyes il sera incessamment procédé à l’extinction et suppression du titre du prieuré de Sainte-Scholastique de Troyes et à l’union de ses biens et revenus au profit d’autres maisons et communautés religieuses ». Le 12 juillet 1763, décret de Claude-Mathias-Joseph de Barral, évêque de Troyes, supprimant le titre du prieuré de Sainte-Scholastique et réunissant ses biens et possessions partie à Notre-Dame de Sézanne, partie aux Ursulines de Troyes, partie au Petit Séminaire de Troyes, à la charge de servir des pensions aux religieuses survivantes. En 1793, le domaine de Sainte Scholastique est mis en vente et adjugé par l’administration du district de Troyes au citoyen Thiébault de Foissy. En 1863, l’abbé Robin, supérieur de Grand-Séminaire, achète la maison de Sainte-Scholastique pour servir de maison de campagne aux élèves du séminaire. On commença par restaurer l’antique chapelle de Saint-Bruno, que le dernier propriétaire avait transformé en pigeonnier, afin de l’utiliser. En 1865, l’Evêque de Troyes bénit la nouvelle chapelle sous le vocable de Notre-Dame-Auxiliatrice. Les statues de Saint Bruno et de Sainte Scholastique ornent cette petite chapelle.
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