En 1912, tout le monde le reconnait, l’apprentissage est en pleine décadence.
Il traverse une crise qui atteint la plupart des Corporations et tout particulièrement l’Industrie du Bâtiment où le recrutement du personnel ouvrier présente parfois des difficultés presque insurmontables.
On voit avec peine disparaître peu à peu les bons ouvriers français dont la réputation était universelle. Partout l’étranger nous supplante. Certaines industries se voient même forcées de recourir presque entièrement à la main-d’œuvre étrangère.
Les Chambres de Commerce et, avec elles, tous ceux qui s’intéressent à la prospérité économique de notre pays, jettent le cri d’alarme et signalent le péril à nos législateurs.
La Chambre de Commerce de Troyes « a le regret de constater que, malgré l’imminence du danger, malgré la grandeur du péril, la question n’avance pas. Notre Parlement témoigne de son impuissance absolue de la résoudre ».
L’Association de défense des classes moyennes a tenu à Paris en 1910, son congrès où le sujet a été traité et discuté dans toute son ampleur, et le président de la Chambre de Commerce de Limoges a proposé la création d’une Chambre des Métiers, en vue de l’apprentissage dans le département de la Haute-Vienne. Il en a créée une en mars 1911, et ce fut aussitôt un très grand succès.
La question de l’organisation de l’apprentissage s’est également posée dans les autres pays industriels. Tous ont procédé à la réorganisation des Corporations, rendu l’apprentissage obligatoire, et créé des cours de perfectionnement à fréquentation obligatoire. Le succès a couronné leurs efforts. L’apprentissage y est en pleine activité. « Dans toutes les professions, nos industriels vont bientôt avoir à compter avec une pléiade de jeunes ouvriers habiles et instruits, dont le travail et les aptitudes serviront merveilleusement leurs concurrents étrangers ».
Puisque la question de l’apprentissage est résolue à Limoges, la Chambre de Commerce estime avoir le devoir d’essayer de la résoudre à Troyes où l’apprentissage a besoin d’une organisation rationnelle.
De renseignements puisés à diverses sources, il résulte que, dans certaines professions, les ouvriers troyens refusent de former des apprentis dans la crainte facilement explicable que l’apprenti, mis rapidement au courant du métier, ne vienne à supplanter l’ouvrier en travaillant à meilleur compte. Aussi importe-t-il surtout de diriger, autant que possible, les apprentis vers les professions où il en manque. Les apprentis trouvant à l’usine un travail rétribué immédiatement et régulier pendant toute l’année, désertent les professions saisonnières du Bâtiment. Il en résulte que les entrepreneurs sont souvent réduits à employer, comme ouvriers, d’anciens manœuvres qui n’ont fait aucun apprentissage et dont l’instruction professionnelle est tout à fait insuffisante. Ces ouvriers, toujours syndiqués, exigent le salaire minimum réclamé par le syndicat, et si, à la suite de malfaçons continuelles, l’entrepreneur met en huitaine l’un de ces ouvriers, le syndicat intervient, provoquant un conflit dont les conséquences sont parfois très onéreuses pour l’entrepreneur.
Il faut qu’au début même de son apprentissage, l’apprenti reçoive un salaire plutôt plus élevé qu’il ne l’obtiendrait comme petit commis dans une administration. Ce sera un sacrifice que s’imposera tout entrepreneur qui formera un apprenti, jusqu’au jour où celui-ci pourra lui rendre des services équivalents à ce salaire.
La chambre de Commerce de Troyes se propose donc de suivre la voie tracée par la Chambre de Commerce de Limoges, et d’organiser des réunions corporatives.
« Des cours d’apprentissage pour les industries du Bâtiment fonctionnent avec succès dans plusieurs villes de France. La Chambre Syndicale des Entrepreneurs de Bâtiments peut donc organiser avec de grandes chances de succès l’apprentissage dans sa corporation. La Chambre de Commerce pourrait lui apporter son concours, soit sous forme de subvention annuelle, soit sous forme de bourses d’apprentissage et de prix en espèces aux bons apprentis. L’attribution de bourses d’apprentissage déciderait certainement un plus grand nombre d’entrepreneurs à former des apprentis, en allégeant le sacrifice pécuniaire nécessité par l’instruction professionnelle de ces derniers ».
C’est ainsi que les conclusions de la Chambre de Commerce ont été approuvées à l’unanimité, et qu’a été créée la Chambre de Métiers de l’Aube.
Ce ne sera qu’en 1925 que les Chambres de métiers et de l’artisanat, qui représentent l’ensemble des 250 métiers de l’artisanat, ont été instituées par la loi Courtier (Joseph Courtier, député de la Haute-Marne). Les 106 Chambres de métiers françaises réparties sur le territoire sont au service de plus de 1.000.000 d’entreprises artisanales.
La Chambre de métiers et de l'artisanat de l'Aube est une véritable force de proposition auprès des pouvoirs publics pour sensibiliser les partenaires économiques et politiques aux besoins de l'artisanat aubois.
Dans le département, elle représente plus de 6.000 entreprises, plus de 10.000 salariés et 1.100 apprentis.
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