Le département



Chou, choucroute


Dans le Briennois, le chou est indéracinable tant il est vrai que cela fait plus d’un siècle qu’on en cultive.

 

Le département de l’Aube est le second producteur français de choucroute, derrière le Bas Rhin.

 

Quand et comment la culture du chou a-t-elle été entreprise dans la région de Vallentigny ?

 

           Peu après 1900, au cours d’un voyage dans la région de Belfort, l’un de nos agriculteurs remarqua les cultures de choux, apprécia la choucroute, se documenta, et, de retour, fit des essais sur ses terres : leurs résultats furent favorables.

 

           D’autre part, vers 1904 ou 1905, un Alsacien, M. L. Grünfelder, vint à Brienne-le-Château, et installa dans le local de la Coopérative agricole, route de Perthes, une fabrique dont l’enseigne peinte en noir au-dessus de la porte : « Fabrique de choucroute de l’Est ».

 

           Tandis que la production réussissait et s’organisait à Vallentigny et aux environs immédiats, les résultats étaient moins satisfaisants à Brienne. A proximité de cette ville, les conditions de culture étaient mauvaises et les récoltes insuffisantes en quantité et en qualité. M. Grünfelder fut amené en 1906, pour approvisionner sa fabrique, à, passer des contrats avec les cultivateurs de Vallentigny, Rances, Crespy. Mais, transporter des choux, avec des attelages à chevaux, à une distance de 8 ou 10 kilomètres, était long et onéreux. Finalement, cet essai fut un échec.

 

           Cependant, dans la région de Vallentigny, les récoltes étaient satisfaisantes, et la bonne qualité des produits entraîna l’organisation de la transformation sur place. Dès 1910, une usine s’installait à côté de la gare. Elle fut rapidement suivie par d’autres, tandis que d’autres encore trouvaient place dans les exploitations agricoles. En 1960, la culture du chou réussit dans une région nettement délimitée, et les fabriques de choucroute y sont installées, à cette date, au nombre de 12 usines : 5 à Vallentigny, 2 à Hampigny, 1 à Maizières-lès-Brienne, 2 à Blignicourt, 1 à Crespy, 1 à Boulancourt.

 

             Le centre de cet ensemble était la gare de Vallentigny.

 

  Pourquoi culture et fabriques se trouvent-elles rassemblées dans un petit périmètre ?

 

           Le chou à choucroute, parmi diverses exigences, en présente impérativement deux, communes d’ailleurs avec d’autres cultures maraîchères : il a besoin d’un sol sain, mais frais, dans lequel il puisse trouver toute l’humidité indispensable à sa végétation, et il demande une nourriture abondante, notamment d’engrais organiques, de fumiers.

 

           Que le cultivateur soit également fabricant de choucroute, ou qu’il livre sa production à une fabrique, il doit s’efforcer d’atteindre 2 buts : échelonner sa récolte de fin juillet à la fin novembre, pour obtenir des choux sains, gros et durs. La précocité des premières récoltes permet de livrer de la choucroute dès la fin de l’été, et de satisfaire le consommateur qui, l’expérience le montre, reprend ses achats dès que cet article reparait chez le détaillant. De la qualité des choux dépend pour une bonne part celle de la choucroute qui sera obtenue. Toutes les variétés de choux ne peuvent pas convenir : il est nécessaire de récolter des choux dont la pomme soit grosse et dure. La taille de la pomme peut atteindre 40 cm. La chair est craquante et le poids moyen est de 5 à 6 kg. Le choix est donc limité aux variétés sélectionnées spécialement pour la choucroute, et chacun sème plusieurs variétés allant du hâtif au tardif, de manière à échelonner la récolte sur, 3 ou 4 mois. Dans le même but, les semis sont échelonnés sur plusieurs semaines. Après une préparation parfaite du terrain, ils sont effectués en pépinière, avec un semoir de maraîcher, en lignes suffisamment espacées, car, dès la levée, qui est rapide, il est nécessaire de dé-presser, de biner à la main, de tenir les jeunes plants parfaitement propres. Surveillés de prêt, ils reçoivent les soins et traitements indispensables pour les préserver de tous les ennemis : insectes et maladies cryptogamiques. Dès la fin mars, les bineurs ou bineuses travaillent courbés jusqu’au sol, munis d’une toute petite binette dont la lame mesure au plus 8 centimètres de large, et dont le manche est long de 25 à 30 centimètres. Au bout de 4 à 5 semaines environ, les jeunes plants ont 5 à 6 feuilles et peuvent être mis en place. La plantation se fait à la machine, elle dépose les plants verticalement dans un sillon étroit que vient d’ouvrir un soc et qui est immédiatement refermé par 2 lames qui tassent la terre contre les racines. Puis se succèdent autant de binages qu’il est nécessaire pour que le champ soit rigoureusement propre. Quand les pommes sont complètement formées, les choux sont récoltés à la main, en choisissant, car la maturité, dans une même plantation s’échelonne toujours un peu.  Séparé de la tige avec une serpe, débarrassée des feuilles écartées qui entourent la pomme, le chou est déposé dans une remorque, avant d’être conduit directement à une usine. Environ 200 à 300 hectares sont plantés en choux. La taille de la pomme peut atteindre 40 cm. C’est un légume riche en eau (93%), en minéraux (calcium, potassium, soufre) et en vitamines (C et groupe B).

 

  La fabrication de la choucroute ne nécessite qu’une installation simple : un bâtiment dans lequel sont alignées de grandes cuves, reposant sur le sol. Primitivement, ces cuves étaient en bois, comme les tonneaux dans lesquels chaque famille alsacienne prépare elle-même sa choucroute. Une fois arrivé à l’usine, le chou doit subir rapidement, afin d’éviter la pourriture, une série de transformations qui vont de l’épluchage et du nettoyage à la mise en fermentation lactique (il faut compter 3 semaines de fermentation), en passant par le salage du chou. Une fois le chou transformé en choucroute, les entreprises fournissent de la choucroute crue ou vendent sous leur propre nom de la choucroute cuite.

 

Dès 1906, Paul Laurent, précurseur dans le sud de la Champagne, se lance dans la production de choux à choucroute aux abords de sa ferme, à Blignicourt, sur des terres riches en alluvion. Son fils André va faire prendre à ce métier, en 1945, une dimension d’entreprise avec la construction d’une choucrouterie. Et c’est le petit-fils Michel, actuel président du Conseil de surveillance, qui, en 1960, intègre une conserverie. Il sélectionne rigoureusement les semences, cultive et transforme sa propre récolte et crée une gamme de choucroutes légume prêtes à consommer, dans une usine à la pointe de la technologie, avec un produit phare « la Choucroute au Champagne », fort prisée des consommateurs. Devenus leader sur le marché français de la choucroute, ils se spécialisent également dans une palette de légumes cuisinés. Les gourmets se régalent aussi avec une choucroute de la mer (en principe, 3 poissons : saumon, cabillaud, haddock fumé, avec une sauce au beurre citronné).

 

Début septembre se déroule chaque année une très populaire et sympathique fête de la choucroute à Brienne-le-Château. Durant ces deux journées, les commerçants locaux et de nombreux exposants investissent toute la ville, et bien sûr, dans tous les restaurants briennois et sous la halle, chacun pourra déguster la célèbre choucroute au champagne.

 

 Une anecdote pour rappeler que depuis longtemps les gastronomes apprécient le rôle intéressant du vin de Champagne dans la choucroute : Bismarck n’a-t-il pas, le 8 décembre 1870, annoté de sa main un menu comportant du faisan en choucroute « faisan avec de la choucroute, laquelle est cuite dans le champagne ».

 

 

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