Jean-Médard Forgeot naît le 8 juin 1798, d’une famille de vignerons. Son aïeul paternel Vorle Forgeot, avait au péril de sa vie, longtemps caché et nourri chez lui, pendant la tourmente révolutionnaire, 2 saints prêtres qu’il avait dissuadé de fuir : M. Soubert, curé de Massigny et M. Benoît, curé de Cunfin. Ils exerçaient secrètement chez lui le saint ministère, ne sortaient que rarement la nuit. Les trahit-on ou se trahirent-ils eux-mêmes ? Dénoncés au district, ils furent conduits à Châtillon-sur-Seine, avec celui qui leur avait donné asile. A force de démarches, d’appuis et même d’argent, Vorle Forgeot fut élargi, tandis que ses hôtes, après un jugement sommaire, furent dirigés sur Paris où l’échafaud les attendait. Pendant le trajet, l’abbé Soubert put s’échapper et s’enfuir. Condamné à mort, M. Benoît dut son salut à la chute de Robespierre.
Le petit fils de Vorle, J.-M. Forgeot est le premier enfant baptisé par l’abbé Soubert après son retour d’exil. Reconnaissant envers l’honnête famille qui s’était dévouée pour lui, l’abbé Soubert prend l’enfant en affection, lui enseigne les mathématiques, la lecture, l’écriture, la grammaire, la géographie...
Le maréchal Marmont, duc de Rague, en relations suivies avec l’abbé Soubert, conçoit l’idée de doter sa ville d’une école dite alors mutuelle. Ce nouveau mode d’enseignement permettait à un seul maître d’enseigner à une classe nombreuse. Le jeune Forgeot, prend ses fonctions en 1815, et dirige une école de 200 élèves. En 1819, l’école de Vix et d’Etrochey lui est confiée. Les conseils municipaux de ces 2 villages (ils ont 1 seule église commune), s’engagent à faire payer annuellement au jeune maître, par chaque chef de famille, 2 francs par trimestre, puis par chaque enfant selon son degré d’instruction, 20, 30 ou 40 centimes par mois, à condition qu’en plus de diriger l’école, le maître remplirait à l’église, les fonctions de clerc laïque, sonnerait d’Angelus 3 fois pas jour, et les offices des dimanches et des fêtes. Tout cela, y compris un casuel dérisoire, rapportait à peine 200 francs. Sur cette somme, l’instituteur prélevait 25 francs pour la location d’une chambre où il s’abritait lui et ses élèves. A cette époque, les classes étaient de la Toussaint à Pâques.
Tirant le numéro le plus élevé du canton, Forgeot fut libéré du service militaire. En 1822, il devient instituteur à Mosson, nouveau binage confié à l’abbé Soubert. Il épouse Jeanne-Marguerite Aubry.
M. Forgeot, pendant 56 ans d’instituteur, secrétaire de mairie et clerc laïque, remplit ces fonctions avec une scrupuleuse ponctualité. Sa classe est un petit musée formé d’objets qu’il fabrique lui-même, pour éclairer ses leçons. D’instinct il a deviné la méthode intuitive qui fixe l’attention des enfants. En 1868, habitant le presbytère de Vailly, il fait à pied 3 km, pour enseigner à Feuges, entouré d’enfants, dont l’un porte un panier contenant son modeste déjeuner.
En 1832, le choléra fait son apparition à Grancey-sur-Ource où Forgeot est instituteur, et terrifie la population. En moins de 3 mois, 72 personnes succombent. Retenus par l’épidémie dans leurs localités respectives, les médecins restaient sourds aux appels désespérés des communes environnantes. Bien que d’une santé très délicate, Mme Forgeot se dévoue durant les 3 mois consécutifs que sévit le fléau, elle passe les jours et les nuits au chevet des malades, au nombre de 150 au moins, les réconforte par ses paroles et son exemple, et en sauve un bon nombre en les guérissant d’une peur irréfléchie, aussi dangereuse que le choléra lui-même. Forgeot seconde sa femme courageusement.
En 1834, bien qu’ayant 2 enfants, Forgeot se charge d’un orphelin, le traite comme son fils, lui facilite l’entrée au séminaire de Troyes où il est ordonné prêtre. Jusqu’à, sa mort en 1863, Mme Forgeot lui sert de mère.
En 1874, M. Forgeot prend sa retraite chez l’abbé Fleury curé de Sainte-Maure.
Il décède en 1878, après avoir exercé les fonctions d’instituteur sans interruption pendant plus de 56 ans.
Il était officier des palmes Académiques, et chevalier de la Légion d’honneur.
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