Les Crimes



Le crime de La Gloire-Dieu


Ferme de la Gloire-Dieu
Ferme de la Gloire-Dieu

      La Gloire-Dieu est une ferme à la sortie de Courteron.

Adérit Delahache, 49 ans, y habite avec sa mère âgée de 76 ans, percluse de rhumatismes, ne quittant guère sa chambre où elle prend ses repas. Par amour filial il reste à ses côtés, mais pense retourner à Paris, dès son décès. Partage la morne existence de ses maîtres, Célestine Beauvallet, jeune domestique de 23 ans.

     Le 21 janvier 1885, un brigadier forestier apporte au propriétaire, un cadeau de gibier. Delahache ferme ensuite la grille, d’entrée avec un cadenas, afin de se mettre à l’abri des rôdeurs.

        Je lis dans la presse de l’époque : " Un triple assassinat a été commis à la Gloire-Dieu dans la nuit du 21 au 22 janvier 1885, sur M. Delahache, sa mère et leur bonne. M. Delahache était propriétaire du domaine, il était célibataire et habitait seul avec sa mère et sa bonne. Il était très riche… ".

Quand on apprend l’affaire de la Gloire-Dieu, c’est le jour de la Saint-Vincent, et une grande partie des habitants font la fête. Aussitôt la population accourt sur les lieux du drame. Celles des communes voisines viennent ensuite, " c’est comme une procession…".

 

Isidore Dubreuil, berger à Courteron, est le premier à connaître le carnage. Ce matin-là, comme à l’habitude, il apporte les journaux. Après avoir appelé à plusieurs reprises, il constate que l’entrée n’est fermée qu’au loquet et que les portes du premier bâtiment sont ouvertes. Il entre dans la cuisine, et essaie de se faire entendre. Les chaises sont renversées. A terre il y a des traces de sang coagulé. Il perçoit alors, sous des couvertures jetées en désordre et ensanglantées, un pied qui dépasse. Epouvanté, il quitte les lieux précipitamment, alerte quelques personnes qui passent, et s’en revient avec elles. Les couvertures soulevées, on aperçoit le cadavre de la bonne. Le groupe monte ensuite à l’étage où gît, morte Mme Delahache mère. De nouveau, au rez-de-chaussée, ils découvrent son fils, lui aussi assassiné, dissimulé sous des couvertures.

 

        Les gendarmes prévenus arrivent vers 11 h. Ils constatent que le crâne de M. Delahache a été fracassé, que la bonne porte au cou des ecchymoses et que sa figure est gonflée et bleue. Quant à Mme Delahache, elle est trouvée dans son lit, tout habillée, du sang sur la figure, enfouie sous ses couvertures.

 

Dans la chambre du fond, le coffre-fort est défoncé.

 

Le procureur, le juge d’instruction, le lieutenant de gendarmerie et le docteur se transportent rapidement vers Courteron. Sur place, il y a déjà plus de 200 personnes, qui seront 500 dans l’après-midi.

Le vol est estimé à plus de 150.000 francs.

 

Au soir du 21 janvier, une femme de Courteron, Maria, revenant de la foire à Essoyes vers les 4 h., aperçoit tout près du village un homme assis : " il avait une petite botte de paille derrière son dos ". Un peu plus loin elle en voit un autre rejoindre le premier. Ils se mettent à courir et elle les perd de vue. Leurs noms sont alors connus : Gagny et Arnould.

       Interrogés, le premier déclare qu’il est allé ce soir là, poser des pièges à renards, à 800 mètres d’Essoyes, après avoir travaillé toute la journée et s‘être endormi près de son poêle. Il était 3 h ½. Il n’a jamais dépassé le chemin de Fontette et il n’a en aucune façon emprunté les chemins où l’on dit l’avoir vu.

       

      Au cours de l’enquête, Arnould qui a été arrêté, fait des aveux complets : " Près de Goulot, nous sommes entrés dans une carrière où nous nous sommes cachés. Gagny m’a fait boire la goutte pour me donner du courage ". Il a convenu avec son complice qu’ils devaient montrer des plants de sapins à M. Delahache et que Gagny lui avait affirmé qu’ils auraient de l’or en cas de réussite. 

     A la Gloire-Dieu, la porte est fermée. La domestique les voit, elle appelle M. Delahache qui vient ouvrir en disant : " Tiens, c’est vous Gagny ? Qu’est-ce qui vous amène à pareille heure ?  Je viens vous demander si vous n’auriez pas de l’ouvrage à nous donner, et vous montrer des échantillons de sapins pour terminer vos plantations ".

      Gagny, 54 ans vit de son métier de casseur de pierres. Il est aussi journalier. C’est un braconnier invétéré, accusé d’avoir assassiné un garde particulier en 1873, d’un coup de fusil. Il a été acquitté, bien que les cartouches retrouvées aient été identifiées comme lui appartenant.

      Arnould est scieur de long. Il a beaucoup de dettes et fréquente assidûment Gagny. Ils ont prémédité ensemble leur forfait depuis 3 mois.

Ce soir là, Gagny assène derrière la tête de Delahache, un violent coup de canne plombée. C’est ensuite le tour de Célestine d’être étranglée, de la mère du propriétaire qui est étouffée dans son lit, et réussissant à ouvrir le coffre, il prend son contenu : des billets de banque, de l’or, une broche, des bagues des petites cuillers en argent, une montre, une lorgnette et un revolver.

Le dimanche 25 janvier, a lieu le service funèbre à l’église de Courteron, où assiste un très grand nombre d’habitants de tous les villages voisins.

 

Gagny est arrêté à Lusigny. Conduit par les gendarmes sur les lieux du crime avec son complice, il y a une foule considérable, plus de 2.000 personnes poussant des vociférations contre les meurtriers.

 

Traduits devant la Cour d’Assises à Troyes, lors du verdict du 17 mai 1885, Gagny est condamné à la peine de mort et Arnould aux travaux forcés à perpétuité.

Gagny est décapité Place de la Tour le 2 juillet, son pourvoi ayant été rejeté. La foule est là. Beaucoup de curieux, véritables grappes humaines, sont perchés sur les arbres de la place, attendant le spectacle. Certains ont passé la nuit là. Dans un bruit sourd, le couteau glisse le long des 2 montants de la guillotine et la tête de l’assassin tombe dans le panier. Justice est faite.

Arnauld meurt pendant la traversée qui le mène au bagne.

Après autorisation du Maire de Troyes, le corps et la tête de Gagny sont livrés à l'Hôtel-Dieu, quelques minutes après l'exécution, pour être soumis à une " batterie d'expériences physiologiques". Quelques jours avant, le médecin et député de l'Yonne, Paul Bert avait écrit au Préfet de l'Aube : " Je n'ai jusqu'à présent pas voulu demander à être autorisé à faire des expériences sur la tête et le corps d'un décapité, parce qu'à Paris, elles sont faites trop tardivement pour donner des résultats utiles. Sachant qu'une exécution capitale  va très probablement avoir lieu à Troyes, je désirerais que les choses fussent disposées de manière à ce que j'aie le corps et la tête à ma disposition quelques minutes après la décapitation, je prendrais  mes dispositions selon le lieu où sera faite l'exécution. Les expériences que je ferai seront d'ordre exclusivement physiologiques. Je veux dire par là que je ne tenterai rien pour ramener les fonctions psychiques dans la tête séparée. On a pas le droit à mon avis de faire de pareils essais. S'ils pouvaient réussir, si l'on parvenait à ramener la conscience et l'activité sensorielle, le résultat serait un supplice physique et moral tellement épouvantable, qu'il équivaudrait à un crime de la part de l'opérateur. Le supplicié a payé sa dette, nul n'a le droit d'y ajouter une torture...". Le Préfet saisi le Ministre de l'Intérieur. L'autorisation est donnée pour mener des expériences à la Sorbonne. 

La ferme de la GLOIRE-DIEU, aujourd'hui Gîte rural
La ferme de la GLOIRE-DIEU, aujourd'hui Gîte rural

 

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