C’est dès 1407 que l’on trouve la présence d’une maison rue des Quinze-Vingts, tenant « des 2 côtés du pavé royal de la rue de l’église de la Madeleine ».
Parmi les détenteurs, figurent, en 1446, Jean de Rance, puis en 1462, Antoine Disosme, secrétaire du roi, dont la fille Guillemette se marie avec Jean Menisson, riche marchand épicier, bourgeois, conseiller de ville pendant 16 ans, de 1502 à sa mort en 1518.
Un de ses fils, Christophe Menisson, seigneur de Saint-Aventin-les-verrières, marié en premières noces à Claude Largentier, acquiert le 16 mai 1538, cette maison qui appartient aux Quinze-Vingts de Paris, dans la rue de ce nom.
Cette rue s’est appelée rue des Gris-d’Arcis (étoffe couleur grise fabriquée à Arcis), puis du Mortier d’Or, rue de Gérard-de-Nivelle, puis de Colas-Verdey (Charmont) dès 1333, du nom de 2 notables y habitant, et en 1460, elle porta le nom des Quinze-Vingts. En effet, elle le doit à cette très petite maison qui appartenait à l’hospice des aveugles de Paris, et qui fut vendue en mai 1538, en l’état de masure, par le président Briconnet, directeur des Quinze-Vingts, à Christophe de Menisson, receveur du domaine à Troyes, qui réunit alors dans son habitation les n° 1, 3 et 5 de la rue des Quinze-Vingts, 8 et 12 de la rue de la Madeleine.
Christophe Menisson est un personnage important. Il fut échevin de Troyes de 1528 à 1530, puis conseiller de ville (comme son père) de 1530 à 1532. La considération dont il jouit à l’échevinage, lui vaut d’effectuer pour le compte de la ville, plusieurs voyages à Paris pour défendre les intérêts de la cité. En 1531, il se rend à Fontainebleau avec Nicolas Largentier, pour savoir si le roi François 1er a l’intention de venir à Troyes pour assister à une représentation du « Mystère de la Passion ». C’est à l’occasion de ces voyages qu’il noua des relations avec le président Briconnet, directeur de l’Hospice des Quinze-Vingts, ce qui lui donna la possibilité de réunir la maison appartenant à cet hospice, aux propriétés voisines.
L’Hôtel Menisson est construit par Christophe Menisson vers 1540, 3, rue des Quinze-Vingts.
Cet édifice construit sur 3 niveaux, avec un immense grenier et une grande cour en avant, permettant de dégager la façade principale pour laisser à la lumière et au soleil la faculté d’éclairer l’ensemble des locaux d’habitation, est élégant. Il est édifié en pierre et brique sur la façade sud-ouest et en pierre pour les 2 pignons.
Au rez-de-chaussée, on trouve une partie centrale, avec accès direct sur la cour, l’antichambre qui sépare une salle à manger, côté rue de la Madeleine, et le salon, rue des Quinze-Vingts.
La propriété de la famille Menisson forme un quadrilatère important, près de la porte de la Madeleine, compris entre la rue de la Corterie aux chevaux (devenue rue Général de Gaulle), la rue de la Madeleine et des Quinze-Vingts.
Au cours des siècles, les immeubles changèrent souvent de titulaires et la propriété fut scindée entre plusieurs familles, au gré des héritages et des mariages.
L’architecture de l’immeuble n’attirait les regards que par les 2 échauguettes placées aux angles de la façade sur les rues de la Madeleine et des Quinze-Vingts. Mais, lors de travaux de restauration, les échauguettes bâties au XIX° siècle disparurent, et avec la réfection du pignon sud-ouest de l’Hôtel Menisson, côté du 3, rue des Quinze-Vingts, apparut enfin l’élégance de cet immeuble.
En 1572, François Trumeau écrivit un poème intitulé « Pirrhae Menissonis Epicedium », sous forme d’éloge funèbre, de 420 vers, à une femme par son mari, François le Duchat. Ce dernier, écuyer, était le mari de Pierette Menisson, l’une des filles de Christophe Menisson. Cet ouvrage se trouvait dans un des Miscellanéa (recueil d’ouvrages) de la bibliothèque de Pierre et François Pithou. Il est aujourd’hui à la Médiathèque de Troyes.
Un événement politique imprévu surgit en 1787 : le roi décide le 15 août, de transporter le Parlement à Troyes, à la suite de profondes divergences avec les membres de cette assemblée, sur la manière de lever de nouveaux impôts. Les magistrats avaient « osé » demander la convocation d’Etats généraux, seuls susceptibles, selon eux, d’octroyer les subsides nécessaires à la couronne. Le Parlement de Paris reçut l’ordre de continuer à rendre la justice en se transportant à Troyes immédiatement. Les habitants s’empressent alors d’ouvrir leurs foyers aux magistrats. L’un d’eux, M. de Can, substitut du procureur général, loge à l’Hôtel Menisson, chez le baron Jacques Corps, seigneur de Regnault, conseiller au grand Conseil, époux d’Anne de Mauroy. Déjà le 16 août, la plus grande partie d’entre eux était arrivée et le lendemain « ces pères de la patrie » comme l’écrit le « Journal de Troyes » avaient posé sur la tête des jeunes élèves du lycée (dirigé par les Pères de l’oratoire depuis 1630), les couronnes de laurier… Le Parlement fut de retour à Paris, après le 24 septembre 1787, lorsque, par de nouvelles lettres-patentes, les magistrats prirent acte de la décision de Louis XVI ; de faire cesser cet exil. M. de Can, comme tous les magistrats, prit congé de ses hôtes. La famille de Jacques Corps, dont la famille posséda le château de Saint-Phal, en a été le dernier propriétaire. Sa famille émigrera à la Révolution. L’immeuble sera vendu comme bien national, et passe dans la famille de Charles de Villiers, officier de santé, ancien chirurgien à Paris, qui le rétrocède à Pierre Barrois, perruquier, en 1805. 1822, nouvelle apparition de la baronne de Corps, après la succession en 1810, de Madeleine Dessaint, veuve de Jacques Corps. En 1834, le vicomte Philippe Massin, neveu du président Corps et son frère, le comte Augustin-Victor de Massin, ancien colonel de Cuirassiers, vendent une partie de l’immeuble à Adolphe Boucher de la Rupelle, qui, à son tour, se dessaisit de son acquisition.
L’Hôtel Menisson est, en 1862, propriété de Pierre-Nicolas Munie, banquier, demeurant à Troyes, place Saint-Pantaléon. Il y établit un cercle littéraire. En 1864, l’immeuble abrite un commerce de chaussures pour mariages et premières communions. Il appartient à la veuve Maret, sous l’enseigne de « Sainte-Marie ».
En 1879, le propriétaire est François Pingaud, puis à son décès en 1897, à M. Férat, jusqu’à
sa vente le 21 mars 1974, à la « Communauté des Chrétiens ». Entre temps, les locaux abritent l’imprimerie Martini en 1907. Entre 1920 et 1968, l’Hôtel Menisson est loué par la Chambre
des Notaires de l’Aube, qui y tint son siège au premier étage. De 1929 à 1936, une salle est mise à la disposition des commissaires priseurs de la ville de Troyes.
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