Tous les Troyens connaissent à Saint-Julien-les-Villas le lieu-dit « Château des Cours », vaste lotissement de pavillons individuels, très arboré.
Ce qui faisait l’orgueil de Saint-Julien, c’était son château, le Château des Cours, avec son immense parc descendant jusqu’aux berges de la Seine, et dont les magnifiques arbres multiséculaires faisaient l’admiration des visiteurs et des promeneurs.
Il y avait en effet un véritable château, mais qui devenant dangereux, car menaçant ruine, est démoli en 1950.
Comme moi de nombreux scouts et louveteaux, dans leur jeunesse, venaient dans cette immense propriété faire des sorties.
L’édifice était un vaste rectangle à un seul étage avec au centre un corps de logis légèrement avancé et une aile en équerre à chaque extrémité. L’avant-corps central était surmonté d’un fronton triangulaire avec, en relief, une Cérès entourée de ses 2 vestales. A gauche étaient situés les communs.
Auparavant, la terre des Cours et de la Renouillère, dénommée au XVII° siècle les « Courts arpents », d’où le nom du château, consistait en une maison très modeste sise au milieu d’un enclos. Elle fut achetée par Jacques Rémond le 25 septembre 1642.
Cet avocat et conseiller du roi au siège et présidial de Troyes, fait construire cette demeure, dans un parc de 40 hectares bordé par la Seine, sur les plans de Louis Maillet chanoine de la cathédrale de Troyes, qui n’en est pas, comme architecte, à son coup d’essai, puisqu’il a déjà, quelques années auparavant, dessiné le portail de l’église de Saint-Martin-ès-Vignes.
Les 2 frères, Nicolas comme Jacques Rémond sont réputés pour leur intelligence et pour la valeur de leurs travaux littéraires : La vie d’Abélard, Lettres du même à Héloïse, La véritable politique des hommes de qualité, que Louis XIV lui-même fait rééditer, les Lettes philosophiques et galantes de Mademoiselle G…, Lettes sur la poésie…
Un très beau parc peuplé d’arbres magnifiques entourait le château. Le jour de la fête patronale, le 20 août (car il s’agit de saint Julien-de-Brioude et non de saint Julien l’Hospitalier), la population d’alentour avait le droit de venir ouvrir le bal. Ce qui faisait la fierté de ce jardin splendide, dessiné par Le Nôtre lui-même, c’était un chêne imposant qui avait le mérite d’avoir inspiré par sa beauté Jean de La Fontaine familier de ces lieux. Sa fable « Le chêne et le roseau » a été écrite à l’ombre de son somptueux feuillage, et elle est d’ailleurs dédiée aux 2 frères Simon, fermiers généraux, avocats et littérateurs Troyens. Il y compose une pastorale pour des bergers et des bergères, donnée dans ce Château des Cours, lors d’une fête en l’honneur du sieur Rémond…
Faisait aussi l’admiration des connaisseurs un autre arbre (abattu par un violent orage en 1895), peuplier flamand de Hollande, connu même jusqu’à Marseille comme « le peuplier de Troyes », haut de 40 m, au feuillage de 80 m de circonférence, et 13 m de circonférence du tronc à ras de terre.
A cette époque, les châtelains, les Rémond des Cours en avaient fait un véritable foyer de culture, réunissant leur « coterie littéraire », composée des meilleurs esprits de l’époque. Ils recevaient Claude Perrault, l’architecte de la colonnade du Louvre et des plans de l’Observatoire de Paris, son frère Charles, le célèbre auteur des contes de fées (propriétaire du château de Rosières). Notre écrivain Nicolas Boileau compose dans ce château une partie de son « Art poétique ». Un autre écrivain Fontenelle, qui mourut presque centenaire, aimait ce lieu pour y composer ses « Eloges des membres défunts de l’Académie française » dont il faisait partie. Le père Tournemine, très lié à Voltaire, dirigeant le Journal de Trévoux est aussi un habitué du Château des Cours, de même que Voltaire qui y vient souvent en villégiature.
L’inauguration du château des Cours eut lieu en 1678.
Rémond des Cours décède en 1716. Pierre Alexandre Levesque de la Ravalière, membre de l’Académie des inscriptions à Paris, né à Troyes, manifeste ses regrets en ces termes : « Une académie réveillerait et ramènerait le génie et les talents dont tant de troyens sont encore abondamment doués ». Cette suggestion est à l’origine de la fondation de la Société académique de l’Aube en 1798.
Nicolas Rémond étant mort célibataire et sans enfant, ses héritiers vendent le domaine en 1782, à Etienne Lerouge de Troyes, qui le transmet à son gendre Victor Masson, maître des Requêtes au Conseil d’Etat et député de l’Aube, qui le fait agrandir et embellir de nouveau le parc dans le style anglais.
Il faillit être acheté par Voltaire. Mais, au dernier moment il lui préféra une propriété à Ferney.
La propriété passe en 1859 à M. Léon Lecomte, armateur, qui la conserve jusqu’en 1874, date à laquelle elle est achetée par Claude Fernand Doé.
Pendant la guerre 1939/1945, les troupes d’occupation allemandes se servaient de cette propriété comme champ de manœuvre. En 1942, elle est vendue à la Société troyenne d’aménagement immobilier. Le château, très délabré est démoli en 1945 et la société Compagnie auboise immobilière crée sur son emplacement un lotissement.
Pour ne pas oublier les prestigieux visiteurs, qui ont fréquenté ce domaine, la municipalité de Saint-Julien a donné leurs noms aux rues parcourant ce quartier.
En 1970, le SOFPA crée pour les cadres de l’industrie textile troyenne et leur famille, un extraordinaire lieu de détente, de rencontre et de convivialité, sur plus de 2 hectares, avec piscine chauffée, tennis, terrains de jeux…
Venez découvrir ce lieu mythique, et, comme Jean de La Fontaine venez y chercher et, pourquoi pas y trouver, l’inspiration !
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