Il y a 180 ans, la médecine ne connaissait, comme moyen d’investigation pour juger de la santé d’un malade, que deux procédés : la prise de pouls et l’observation des urines.
Les battements du cœur par la prise du pouls sont observés dès la plus haute antiquité.
En ce qui concerne l’examen des urines, on en trouve mention dans les papyrus égyptiens et sur les tablettes d’argiles assyriennes.
Hippocrate, en 400 avant J-C., est considéré comme le père de la médecine. Des volumes entiers du « Corpus hippocratique » étudient le volume, l’aspect, l’odeur, le sédiment et les différentes altérations des urines.
Le Moyen-Âge connaît à Troyes ses « mireurs d’urines ».
Comment procèdent-ils ? L’urine est observée, par transparence, dans le « matula », autrement dit le « vase de nuit ». On juge ainsi de l’aspect des urines, de la couleur, de la limpidité, et on observe surtout les « contents », c’est-à-dire les sédiments.
Au XIV° siècle, l’examen des urines prend un caractère presque scientifique. Acturios, qui est médecin, consacre 46 chapitres de son traité à la valeur séméiologique de l’examen des contenta dans les urines : « La science des urines est plus rapide et plus sûre que celle du pouls, car elle place tout sous nos yeux, tandis que l’autre subordonne tout au toucher. Or, il est bien plus facile à juger sur ce qu’on voit que d’après ce qu’on touche ».
Mais, il est des Mireurs d’urines qui sont des charlatans notoires. En 1494, Nicolas Ehrart est expulsé de Troyes par sentence. Il a 20 ans, et dit qu’il a appris l’art de guérir à Nantes et à la cour du roi « Notre Sire », soignant et guérissant les coups et blessures, en examinant les urines et prescrivant ses médicaments.
Jean Rayer ou Raget, ancien aide aux armées (régiment de Custine-dragons), arrive à Troyes dès la Révolution. Il se dit chirurgien et prétend s’occuper des urines depuis l’âge de 12 ans. Il se dit d’ailleurs « consulteur d’urines », et habite rue des Trois Petits Ecus. En 1798, les membres de l’Administration Municipale de Troyes indiquent que Jean Rayer est déclaré « non reçu, sans études et sans talents. Il est de plus, de mœurs suspectes ». Le docteur Bidor, médecin troyen, fait de ce charlatan, une mordante caricature dans une poésie en vers de 8 pages, intitulée « Les mystère de l’uroscopie ». Il indique que Rayer a une façon bien simple d’abuser de ses clients sur ses dons de divin. Il se cache dans un placard. Le patient, en arrivant, raconte son histoire à la femme du charlatan. Celui-ci sort alors de sa cachette, parfaitement au courant de l’histoire de la maladie.
Charles Feuillet, qui se dit « Inspecteur des urines », habitant rue des 3 Maures (rue du Paon), est dénoncé comme charlatan, le 1er Germinal an III.
Ainsi, le « mireur d’urines », s’il se double parfois d’un charlatan, doit être en fait considéré comme le précurseur des biologistes modernes. Ils se servent adroitement de leurs sens : la vue, l’odorat… le goût, même !
Voici une histoire plus récente. Blanc, officier de santé à Bar-sur-Aube, traite les malades sans les voir, fussent-ils éloignés de 50 lieues, pourvu qu’ils envoient tous les 15 jours, leurs urines qui, selon lui, sont un vrai miroir, constituant essentiellement la partie la plus intéressante de la médecine. « Il dit si l’urine est d’un homme ou d’une femme, il révèle son tempérament et son humeur dominante, il nomme la maladie… ». Un farceur va un jour lui présenter l’urine d’un ami, bon vivant comme lui. Le consulteur l’examine puis déclare : « Mais, c’est l’urine d’un mort ! ». Une heure plus tard, le bon vivant était mort ! !
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