La chute de Sedan a un énorme retentissement dans l’Aube.
Une sorte d’exaspération collective s’empare des esprits ; un chômage grandissant s’y ajoute.
Les Romillons sont réduits à une condition si misérable que, le 13 septembre, plusieurs d’entre eux vont se porter à de terribles imprudences.
Ce jour-là, 27 hussards de la Mort, venant de Sézanne par la route de Marcilly se présentent à l’entrée de Romilly.
Chargés d’une mission de reconnaissance, ils s’arrêtent à la hauteur des premières maisons. En quelques instants, la rue se fait menaçante.
Un soldat ennemi arrive en trombe à l’hôtel de ville.
Un flottement d’indécision parcourt la foule. La cité, jalouse de son indépendance ne veut pas se laisser faire. Des centaines de poings menaçants, une indescriptible tempête de cris et d’injures accueille si bien l’intrus, que celui-ci tourne bride aussitôt.
Au moment où le hussard, lancé au galop de charge, passe derrière la Halle, des huées se font si violentes, que le cheval effrayé, bute, entraînant son cavalier dans sa chute. L’Allemand touche à peine le pavé qu’un Romillon brandit un pistolet et, à bout portant, tire sur l’homme à terre. Mais l’arme est vieille, le coup fait long feu, épargnant le cavalier, qui s’enfuit par le chemin de Conflans.
Quelques secondes plus tard, un second coup de feu éclate dans la rue de la Chaussée de Sellières. L’agitation croit, un incident paraît imminent.
Le maire, accompagné du curé, du juge de paix et de quelques notables, se porte au-devant de l’ennemi. Le courageux magistrat dit la misère de la cité, les métiers arrêtés, la population employée à raison d’un franc par jour (les ¾ de cette somme sont alloués sous forme de bons de pain, 25 centimes seulement sont versés en espèces) sur les chantiers communaux et si pauvrement alimentée, si misérable dans son ensemble, que le désespoir et la faim la pousse à des gestes inconsidérés.
L’officier et sa troupe s’en vont dans la direction de Sézanne.
L’après-midi, 6 hussards à tête de mort arrivent par le chemin de Conflans, quand une pierre lancée par la fronde d’un adolescent atteint l’un d’eux à la nuque. Les témoins s’éclipsent rapidement. Alors, de la pointe de son arme, le cavalier furieux brise les vitres des maisons voisines, et administre une correction du plat de son arme à un passant.
Les 5 autres hussards prennent la direction de l’embarcadère du chemin de fer, abattent quelques poteaux du télégraphe, rentrent en ville et s’arrêtent devant l’hôtel des Postes afin d’y couper la ligne télégraphique. Mais le receveur s’enferme. Cela permet de sauver la ligne télégraphique de Romilly.
Quelques semaines plus tard, la maison du passage à niveau de la Boule d’Or brûle et de nouvelles et sanglantes représailles ont lieu, mais la Poste résiste.
La foule, massée autour de la recette postale manifeste clairement son hostilité, et les hussards s’éloignent par la route de Marcilly.
Romilly et son canton deviennent le siège d’un extraordinaire mouvement de résistance.
A 3 reprises différentes, les habitants de la vallée de l’Ardusson s’ébranlent au son du tocsin, arrivent à Romilly et passent la Seine, armés de faux, de bâtons, de vieux fusils.
Il y a des villages où il ne reste que les malades et les vieillards.
Les gens de Clesle arrivent avec leur curé en tête, ceux de Béthon et autres villages voisins marchent toute la nuit pour résister derrière le fleuve…
C’est un spectacle singulièrement émouvant.
La plupart de ces gens, plus habitués du maniement des armes depuis plus de 20 ans, ne savent ni charger, ni tenir un fusil…
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