Dans une maison, à 2 lieues de la ville, ayant un troupeau considérable de mérinos et une culture importante, les Cosaques ravagent tout, enlèvent ce qu’il y a de plus précieux, et brûlent ce qu’ils ne peuvent pas emporter. Puis ils assassinent le domestique qui en avait la surveillance générale, le coupent en morceaux et jettent par la fenêtre, les lambeaux sanglants.
A Villemereuil, des officiers supérieurs, logés dans le château, brûlent les portes, les armoires, après avoir pillé tout le linge et les effets qui y étaient enfermés, et menacent de la mort quiconque veut s’y opposer.
A Saint-Lyé, des officiers et quelques soldats brisent tout dans le presbytère, puis obligent le curé M. Pidanzat, ayant un pistolet sous la gorge, à être non seulement spectateur du viol de sa domestique, mais encore à tenir les membres de cette infortunée femme, tandis que les monstres satisfont leur plaisir.
A Mesnil-Sellières, les Cosaques et les Wurtembourgeois tirent sans provocation sur les habitants. 11 hommes sont tués dont plusieurs notables. Dans une maison, une jeune femme est occupée à donner des soins à son jeune enfant, ils veulent la violer. Elle se défend, elle crie et se sauve dans la rue. Les gens sortent de la messe, et veulent aller à son secours. La soldatesque indisciplinée tire sur tout le monde, viole plusieurs filles et femmes de différents âges, font un pillage général, et brûlent 108 maisons représentant 115 ménages.
A Saint-Julien, tout est pillé, mais c’est dans le presbytère et sur le prêtre Gaffier, chanoine de la Cathédrale et curé desservant Saint-Julien, plus que septuagénaire, que les soldats assouvissent leur fureur. Ils commencent par piller la maison, brisent les meubles, défoncent à la cave les muids et répandent le vin, et exigent que le curé leur fournisse de l’eau-de-vie et des liqueurs. Ce qui lui est impossible à réaliser, puisqu’ils ont tout pris ou brisé. Alors, ils se jettent sur lui, l’accablent de coups, le dépouillent de ses vêtements, même de sa chemise, et, « c’est dans cet affreux état qu’il est indignement outragé : une ficelle ou cordon le tient attaché à cette partie du corps le plus sensible pour l’homme, et que la pudeur nous fait un devoir de taire. Ainsi tenu, des soldats le forcent à faire plusieurs fois le tour de sa chambre en le frappant à coups redoublés. Enfin, totalement épuisé, l’infortune tombe accablé sous le poids des plus horribles douleurs et expire quelques minutes après ».
Le même jour, son neveu Gaffier, vicaire de la cathédrale, dangereusement malade, périt également, après avoir été violé à plusieurs reprises.
Toutes les maisons de campagne des environs de Troyes, les fermes isolées, les hameaux sont pillés, ravagés, les bestiaux sont enlevés. Partout les barbares brisent, brûlent les instruments aratoires. Il n’existe presque plus de chevaux dans tout le département pour la culture et les transports.
A Pougy, des officiers saisissent le nez d’un honnête chirurgien entre des pincettes et le promènent ainsi.
A Clérey, 2 jeunes conscrits français, déserteurs, sont découverts cachés dans un silo. Les soldats les abreuvent d’outrages, leur crèvent les yeux et les jettent vivants dans la Seine.
Une demoiselle de Brienne, âgée de 80 ans, est trouvée morte chez elle, après avoir été plusieurs fois violée. Une personne du même âge a éprouvé un sort semblable à Nogent. De nombreuses jeunes femmes et jeunes filles de Mesnil-Sellières servent de jouet aux troupes étrangères.
Les enfants ne trouvent pas grâce devant ces ignobles individus. Une mère doit à plusieurs reprises arracher une de ses filles à peine âgée de 12 ans, des mains de ces satyres. Beaucoup de femmes, prises de force et déshonorées, préférant la mort à une vie de honte, se suicident. Ainsi, à Vendeuvre, la femme Ollivier qui, prenant son corps en horreur, se noie dans la Barse.
Les morts restent sur le sol, sans sépulture, depuis le début de la campagne. Les paysans n’ont pas la force d’obéir aux injonctions de l’administration, ni la volonté d’enterrer les débris humains et les carcasses des chevaux morts. Il se dégage des charniers une odeur infecte qui détermine des maladies contagieuses dont beaucoup périssent.
Vendeuvre perd ¼ de sa population, en raison de l’air pestilentiel qu’on y respire. De même Lusigny, Montiéramey, Magny-Fouchard, où l’autorité désespérée, a négligé d’enfouir les cadavres et les chevaux gisant sur la terre. L’importance des combats de Bar-sur-Aube accumule les cadavres dont la putréfaction occasionne le décès d’une partie de la population. Les hommes employés à recouvrir de terre les cadavres et les carcasses d’animaux fuient après 1 heure de travail, tant il est difficile de résister à l’odeur insupportable dégagée par des corps en décomposition. Les habitants jettent les cadavres à l’eau pour s’éviter la peine de les enterrer. A Fontaine, 800 ennemis ont ainsi le lit de l’Aube pour sépulture ; il en est de même à Rosnay et dans presque tous les pays situés au bord des rivières. Le département et l’arrondissement de Bar-sur-Aube, en particulier, offrent aux regards le spectacle épouvantable de tibias et de crânes entremêlés de carcasses de chevaux.
Tant de maux, tant d'excès, obligent plus de 200 familles à abandonner leurs maisons, à chercher un abri, soit dans des caves et souterrains, ou à fuir dans les bois environnant Troyes, et à s'y nourrir de racines. Beaucoup de pères de famille abandonnent femmes et enfants, et se donnent la mort ! Ainsi, Laratte, 40 ans, père de 3 enfants, après avoir été maltraité, ses jours menacés par les soldats qu'il a chez lui, quitte femme et enfants. Mais avant, il ôte un de ses pantalons, le remet à sa femme avec 3 francs qui lui restent, lui dit adieu, et part se suicider !
« Les journées des 20, 21, 22 et 23 février seront à jamais mémorables, par le souvenir des meurtres, des massacres et du pillage qui les ont signalées, des nombreux incendies qui les ont éclairées ».
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